Un billet sur un sujet très local mais qui me tient à cœur. J’ai l’habitude de penser que la démocratie commence au seuil de sa porte dans le sens où elle a besoin pour vivre d’un espace public dans lequel la rencontre et le dialogue sont libres et possibles.
J’ai eu l’occasion de l’éprouver jeudi lors d’un comité de quartier où tous les habitants étaient conviés pour une présentation du service prévention et sécurité de la mairie. Cette présentation tombait bien car depuis quelques temps que les nuits sont de moins en moins calmes et les habitants de mon quartier se plaignent de manière de plus en plus virulente de nuisances et d’incivilités.
Sachant cela, je m’attendais donc à ce que des questions fusent sur le sujet. A mon grand étonnement, j’ai réalisé que loin de se limiter à mon quartier, les autres quartiers du secteur relevaient tous des problèmes similaires.
Les constantes étaient sur le niveau de bruit surtout la nuit, l’apparente impunité des magasins vendant de l’alcool jusque tard dans la nuit et des dégradations en tout genre voire d’agressions physiques de passants.
Face à cela, le responsable de la mairie nous a clairement indiqué son dénuement. Son service ne dispose après 19h que d’une surveillance des bâtiments municipaux. Il a à sa disposition 50 agents assermentés, qui sont des Agents de Surveillance de la Voie Publique (ASVP) et pas des Agents de Police Judiciaire Adjoint (APJA). En clair, il nous a indiqué qu’il n’avait pas de Policiers Municipaux aptes à intervenir dans ce genre de cas. Sans moyens, il se retrouve comme avec une main attachée dans le dos.
J’ai pris la parole pour prendre acte de son exposé et faire ainsi remarquer que son service ne pouvait pas adresser les plaintes des habitants. Son service n’est en effet pas en mesure de vérifier l’application des arrêtés de fermeture pris par le maire. Seule la Police Nationale le pourrait. Sauf que, pour les points de ventes en retrait de la rue, il semble très compliqué pour les policiers de le faire.
Cette prise de parole m’a valu une charge publique de la part du représentant des élus qui a trouvé que ce constat était « insultant pour les services de la mairie que vous accusez de ne rien faire ».
J’ai quand même insisté pour comprendre en quoi cette prise de parole était un problème. En insistant, j’ai fini par comprendre que ce qui gênait n’était pas le fond de mon propos mais le fait que ce soit moi qui le tienne. Faute de pouvoir trouver le moindre propos insultant dans ma prise de parole ni même de décalages par rapports aux faits, j’ai même eu le droit à un « ta manière de manipuler (sic) l’art oratoire est assez ambigu pour que chacun comprenne ce qu’il souhaite ». Je découvre là le concept d’insulte qui n’en est pas vraiment une….
Le jour où ce qui devient un problème n’est pas le contenu du message mais le porteur, nous pouvons commencer à nous inquiéter pour le principe même de la démocratie.
Surtout qu’en l’occurrence ce que demandent les citoyens c’est une écoute active. C’est-à-dire une étude réelle des points relevés sur chaque quartier et la mise en place de plans d’action. Les considérations vagues sur le monde comme il va occupent l’espace mais ne répondent pas aux attentes.
Puisqu’on me reproche de faire de la politique, je me permets de rappeler une citation que je chéris de la grande philosophe politique Hannah Arendt : « La liberté d’opinion est une farce si l’information sur les faits n’est pas garantie et si ce ne sont pas les faits eux-mêmes qui font l’objet du débat »
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