![960px-Lake_kivu_Rusizi[1]](https://oanthore.fr/wp-content/uploads/2025/04/960px-Lake_kivu_Rusizi1-678x381.jpg)
Le 25 avril 2025, le Rwanda et la République démocratique du Congo (RDC) ont signé à Washington un accord de paix historique, sous l’égide des États-Unis et du Qatar. Cet événement marque une avancée significative pour la stabilité régionale, mettant potentiellement fin à des décennies de conflits meurtriers dans l’est de la RDC. Derrière cette réussite, ce sont la diplomatie américaine et qatarie qui se distinguent, au détriment d’organisations africaines largement marginalisées dans le processus.
Le conflit dans l’est de la RDC, territoire riche en ressources naturelles, a longtemps été alimenté par des intérêts économiques et politiques complexes. Le Rwanda, sous couvert de protéger sa sécurité nationale, a tenté d’étendre son influence sur les provinces minières congolaises, avec la complicité de certaines élites locales. À cette situation instable est venue s’ajouter la prolifération de groupes armés, dont le M23 soutenu par Kigali, exacerbant le chaos dans la région.
Malgré de nombreuses tentatives de médiation — notamment par l’Union africaine, la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC) et la SADC — les processus de Luanda et de Nairobi sont restés sans effet. L’incapacité de ces organisations à obtenir des avancées concrètes a laissé la voie libre à une médiation extérieure. Washington et Doha ont ainsi pris l’initiative, opérant rapidement et discrètement pour forger un accord en rassemblant Kinshasa, Kigali, et les représentants du M23.
Le rôle du Qatar a été particulièrement décisif. En accueillant des pourparlers directs entre la RDC et le M23 à Doha, il a permis de surmonter les blocages diplomatiques persistants. Les États-Unis, de leur côté, ont soutenu l’ensemble du processus, apportant leur poids politique et garantissant l’engagement des deux États à respecter leur souveraineté. La convergence de ces deux médiateurs a permis d’imposer une dynamique constructive que les initiatives africaines n’avaient pas su instaurer.
Ce succès diplomatique contraste fortement avec les difficultés rencontrées par Washington en Ukraine. Alors que les efforts américains pour résoudre le conflit ukrainien s’enlisent face à l’intransigeance russe et aux divisions internes de l’OTAN, leur intervention en Afrique a été rapide et efficace. Ce paradoxe s’explique en partie par une configuration géopolitique différente : en Afrique, la compétition stratégique est moins directe avec la Chine, et le Qatar, acteur régional puissant et influent, a joué un rôle de facilitateur que les Européens n’ont pas su assumer en Europe de l’Est.
Cependant, ce succès soulève aussi des interrogations majeures sur le rôle des États africains dans la résolution de leurs propres crises. Si l’intervention extérieure a débloqué une impasse, elle a aussi mis en lumière la dépendance croissante des pays africains vis-à-vis des puissances étrangères pour régler leurs conflits. Cette situation risque de marginaliser davantage les institutions africaines et de compromettre à long terme la souveraineté politique du continent.
L’accord de paix signé entre la RDC et le Rwanda représente une victoire diplomatique indéniable pour les États-Unis et le Qatar. Mais il révèle aussi une faiblesse structurelle inquiétante pour les États africains : celle d’une perte de contrôle sur la gestion de leurs propres affaires. Alors que la diplomatie américaine trébuche en Ukraine, son succès en Afrique rappelle que la résolution des conflits passe autant par l’habileté stratégique que par la capacité des acteurs locaux à se prendre en main. Reste à savoir si cet accord sera le socle d’une stabilité durable ou seulement une trêve dans un cycle de crises encore inachevé.
Poster un Commentaire